NOUS NOUS CACHERONS SOUS DES PLUIES DE FEUILLES SÈCHES ET NOUS ATTENDRONS, ENCORE, LE SIFFLEMENT DE LA CORRESPONDANCE
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Pour tout dire...
Pourquoi ce spectacle?

Bien que le Théâtre des Égrégores existe depuis 1990, ce projet est le premier d'une nouvelle équipe, particulièrement jeune et soucieuse de se projeter à la fois dans le monde du présent et dans le théâtre qu'elle fait et propose.

Nos regards.
Notre regard porté sur les sociétés – celle à laquelle nous appartenons et celles, proches ou lointaines, dont nous sommes les voisins (les frères?) – nous est fondamental car il nous apparaît incertain et même dangereux de prétendre théâtraliser le quotidien sans l'appréhender, sans en partager sinon la complexion du moins la vision.
Notre regard est aussi un regard porté en nous-mêmes, sur nos identités artistiques, sur notre désir individuel d'un théâtre collectif.
Ainsi, mieux se voir et mieux voir le monde, mieux écouter pour mieux dire. Mais aussi mieux comprendre notre théâtre pour mieux l'offrir.

Le comment explique parfois le pourquoi.
Nous nous sommes interdits beaucoup. Nous nous sommes énormément autorisés. Il s'agissait pour nous, dès le commencement, d'aborder le travail de front, d'en éprouver les difficultés, d'en surmonter les obstacles.
Nous avons ainsi refusé la logique économique d'une pièce pour un, deux ou trois acteurs, nous avons résisté à la tentation du réalisme, nous n'avons pas ouvert les écritures à la mode comme nous avons rejeté les artifices d'un art devenant conceptuel, nous n'avons formaté ni le temps de la réflexion, ni celui du plateau ni la durée de l'histoire.

Au contraire.
Nous avons choisi d'être plusieurs parce que le propos l'exige, nous avons favorisé la création parce que ce texte nous ressemble autant qu'il nous rassemble, nous nous sommes imposés des choix de travail inédits pour la plupart d'entre nous (training, masque, improvisations, écriture) parce que nous ressentions ces territoires inconnus nécessaires au cheminement du spectacle. Nous avons privilégié le jeu théâtral quand il s'agit presque partout de ne surtout plus jouer. Impatients, nous avons pris le temps de goûter à notre aventure.

Une aventure.
C'est bien de cela qu'il s'agit. Que vaut le théâtre sans audace, sans enthousiasme, sans l'exigence qu'impliquent le désir, le rêve, la curiosité?

La curiosité...
A force d'entendre que tout va mal autour de nous, que ce siècle est terrible, qu'il nous promet des jours à venir plus terribles encore, le risque est de croire que tout cela soit vrai.
Face au catastrophisme ambiant nous avons ressenti le besoin d'y voir clair, de jeter un oeil non complaisant, porter un regard sur notre monde et ses démons (in)visibles. Sans pouvoir nous détacher de la subjectivité évidente d'une telle observation et conscients de l'arbitraire de nos choix, nous avons imaginé une situation dramatique où projeter certaines des peurs dans lesquelles, paraît-il, nous vivons ou vivrons, tous, au quotidien.

Le monde des hommes en société donc, et ses violentes contradictions, l'humanité encore, ses mensonges, sa folie barbare, mais aussi son incroyable pouvoir de survie et la beauté de ses illusions.

Parce que nous sommes d'ici, d'ailleurs et de là-bas, parce que nous sommes de jeunes femmes et de jeunes hommes portant comme les autres leur vieillesse à venir, parce que l'avenir de tous tient dans l'instant d'un seul, parce que demain c'est hier, parce que les paradis perdus et les enfers florissants, parce que vivre c'est un peu dire, parce que le théâtre est notre voix à nous, notre cri à nous, notre réponse à tous, parce que le monde des hommes, c'est notre monde...

Le monde des hommes, notre monde...